En m’installant à Auroville, en 1996, j’étais surpris de n’entendre qu’une seule langue, l’anglais et surtout de constater que, ce que Mère avait demandé au sujet des langues à Auroville n’était pas respecté.
Référence: Mère et les langues à Auroville, dans “Mère parle d’Auroville” p.77 (Mère a dressé une liste des langues pour Auroville)
- Le tamoul, car Auroville est situé dans le Tamil Nadu
- Le français, car c’est une langue claire et précise
- Le sanskrit simplifié, pour remplacer le hindi comme langue de l’Inde
- L’anglais comme langue internationale.
Je pense que Mère n’a pas cité ces quatre langues pour rien.
Toutes les réunions et écrits n’étant qu’en anglais, comment s’intégrer et participer à la vie d’Auroville si on ne maîtrise pas cette langue ?
Donc, à partir de cela, j’ai décidé de créer une équipe pour traduire les nouvelles de l’époque qui n’étaient qu’en anglais.
Je ne connaissais personne ni d’endroit pour démarrer ce travail que j’ai financé personnellement pendant plusieurs années. Comme par hasard, on me parle d’un français qui connaissait bien l’anglais et qui venait de terminer un travail d’électricien au Matrimandir et ensuite d’un tamoul qui était également disponible et capable de faire ce travail. J’ai donc fait la connaissance de Swar pour le français et de Thillai pour le tamoul. Dix ans plus tard nous sommes toujours ensemble et pleins d’énergie. Un petit local, à Aurelec, près du service des News à l’époque était libre. Les personnes et l’endroit étaient là, c’était évident que ce travail devait se faire.
J’ai acheté des ordinateurs d’occasion, d’autres ont été donnés, une petite aide financière est venue de France, le premier numéro est sorti en octobre 2001.
Au début, les nouvelles en tamoul et en français étaient agrafées aux News anglaises et distribuées à tout le monde. Elles furent très appréciées par les francophones et les tamouls. Bien sûr, quelques réactions d’opposition virent le jour de la part de certaines personnes non francophones, sans doute mécontentes de voir s’installer le français et le tamoul à Auroville.
Comment aller contre ce que Mère avait proposé ? Ce fut et c’est notre force pour continuer ce travail avec détermination.
Selon moi, ces traductions n’étaient pas suffisantes. Comment être plus proche de ce que Mère avait voulu et comment communiquer au quotidien avec nos amis surtout ceux avec lesquels on travaille ?
Normalement, quand on arrive dans un pays, on apprend sa langue et non l’inverse. Chaque Aurovilien doit faire un effort de communication pour mieux comprendre la culture tamoule et ainsi vivre en meilleure harmonie.
Comment peut-on comprendre si on ne peut communiquer ?
Très peu d’Auroviliens pionniers parlent le tamoul.
A partir de cette idée et à travers les « Nouvelles » publiées chaque semaine, j’ai créé des petites phrases simples, utilisées quotidiennement dans la vie courante.
Ces mots et ces phrases, sous la forme d’un tableau, étaient traduits dans les 4 langues d’Auroville avec des leçons de grammaire.
C’était le commencement de cours de langues qui, à ma grande surprise, eurent un grand succès dès le début.
Tout ce travail dura 1 an et aboutit à la création d’un livre: Aurolang. Ce livre est toujours en vente dans plusieurs pays à travers un distributeur en France; nous en sommes à la 3e édition.
En même temps, nous avons essayé avec toute l’équipe de répandre ces 4 langues dans Auroville pour informer le public sur le Matrimandir, le Centre des Visiteurs, le Town hall, etc….Ce travail n’est pas terminé, nous devons faire face à beaucoup de résistance. Pourquoi ?
Il y a quelques années nous avons déménagé au Town Hall avec le service des News and Notes; Auro-Traductions est un service reconnu et financé en partie par Auroville.
Auro-Traductions, est là aussi pour aider les autres services à la traduction de différents textes en tamoul et en français.
Vatchala est venue, il y a 3 ans, épauler Thillai pour les traductions en tamoul.
Quant au français, nous essayons de trouver de l’aide dans Auroville mais aussi à l’extérieur car c’est un travail régulier et contraignant qui se fait depuis 2001 sans avoir manqué un seul numéro.
J’espère simplement que des jeunes viendront participer à ce travail et comprendront son utilité pour une meilleure cohabitation avec nos amis auroviliens tamouls mais aussi avec les villages avoisinants.
Merci à toute l’équipe pour ce travail essentiel pour la communication. Je suis persuadé que cette ouverture vers d’autres langues aide Auroville à grandir dans l’acceptation de la différence et d’autres cultures.
Ce travail correspond au programme de l’UNESCO qui se bat pour le maintien et le respect des langues dans le monde.
Claude Jouen
Voir Auro-traduction sur le site officiel d’Auroville : Cliquer ici – la page est en français.